Décret n°81-60 du 16 janvier 1981 fixant les règles de déontologie applicables aux médecins et aux pharmaciens chimistes des armées

Dernière mise à jour des données de ce texte : 19 septembre 2008

Version en vigueur au 28 janvier 1981

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre de la défense ;

Vu le rapport de la santé publique, notamment ses articles L. 356 et L. 541 ;

Vu le code de la sécurité sociale, et notamment ses articles L. 258, L. 595 et L. 600 ;

Vu les conventions de Genève du 12 août 1949 ;

Vu la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires ;

Vu le décret n° 74-27 du 14 janvier 1974 relatif aux règles de fonctionnement des centres hospitaliers et des hôpitaux locaux, notamment son article 22 ;

Vu le décret n° 74-431 du 14 mai 1974 abrogeant certaines dispositions du code de la santé publique et fixant les conditions de la coopération du service de santé des armées et du service public hospitalier, notamment son article 18 ;

Vu le décret n° 74-515 du 17 mai 1974 modifié portant statut particulier des corps militaires et des médecins, des pharmaciens chimistes et des vétérinaires biologistes des armées, notamment son article 5 ;

Vu le décret n° 78-194 du 24 février 1978 relatif aux soins assurés par le service de santé des armées ;

Vu le décret n° 78-848 du 9 août 1978 fixant les attributions du service de santé des armées ;

Vu le décret n° 79-1088 du 7 décembre 1979 relatif à l'organisation et au fonctionnement des commissions particulières en matières de sanctions professionnelles ;

Vu la délibération du comité consultatif de santé des armées en date du 4 janvier 1980,

  • Les dispositions du présent décret s'imposent aux médecins et pharmaciens chimistes des armées, qu'ils servent on non dans les armées soit comme élèves officiers ou officiers de carrière, soit comme officiers de réserve en situation d'activité, soit comme officiers servant sous contrat ; elles s'appliquent également, en dehors des permissions et congés visés à l'article 103 de la loi portant statut général des militaires, aux étudiants en médecine, en pharmacie ou en chirurgie dentaire ainsi qu'aux médecins, pharmaciens et chirurgiens dentistes qui accomplissent les obligations légales du service militaire actif dans le service de santé des armées ou qui, placés dans la disponibilité ou la réserve du service militaire, sont appelés en cas de mobilisation, rappelés ou convoqués pour une période d'exercice.

    • Les médecins et les pharmaciens chimistes des armées sont des officiers placés dans une situation statutaire fixée par la loi portant statut général des militaires et ses décrets d'application.

      La qualité de médecin ou de pharmacien leur impose en outre d'adopter une conduite conforme aux principes généraux régissant l'exercice de leur profession ainsi qu'aux dispositions des conventions internationales ratifiées par la France, en particulier à celles des conventions humanitaires.

    • Dans l'exercice de ses fonctions, le médecin des armées s'attache à respecter la dignité des personnes dont il a la charge.

      Le respect de la vie et de la personne humaine est un devoir primordial qui s'impose au médecin et au pharmacien chimiste des armées. En particulier ceux-ci ne doivent en aucun cas participer même passivement à des actions cruelles, inhumaines ou dégradantes.

    • Article 4

      Version en vigueur du 28 janvier 1981 au 19 septembre 2008

      Sauf en cas de force majeure, le médecin des armées doit porter secours à tout malade ou blessé en danger immédiat et s'assurer qu'il reçoit les soins médicaux nécessaires.

      En l'absence de médecin susceptible de le faire, le pharmacien chimiste des armées doit, dans la limite de ses connaissances, porter secours à un malade ou blessé en danger immédiat ; dans les mêmes conditions il leur doit assistance.

    • Dans l'exécution de sa mission, le médecin des armées doit soigner avec la même conscience tout malade ou blessé, quels que soient sa condition, sa nationalité, sa race, sa religion ou les sentiments que celui-ci lui inspire.

      Pour sa part, le pharmacien chimiste des armées doit faire preuve d'un égal dévouement à l'égard de tout malade ou blessé.

    • En toutes circonstances, le médecin et le pharmacien chimiste des armées ne peuvent abandonner les patients placés sous leur responsabilité. Lorsque des circonstances exceptionnelles l'exigent, en temps de guerre ou de crise, le commandement peut, par un ordre formel, leur prescrire de quitter leur poste.

    • Le médecin et le pharmacien chimiste des armées disposent, pour l'accomplissement de leurs tâches spécifiques, de l'indépendance nécessaire quant au choix et à la mise en oeuvre de leur technique, dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur et dans le cadre des directives techniques et de commandement ayant pour objet l'exécution des missions du service.

    • Le médecin et le pharmacien chimiste des armées ont le devoir d'entretenir et de perfectionner leurs connaissances et leurs capacités professionnelles. Ce perfectionnement concerne les connaissances techniques, administratives et militaires indispensables à l'exercice de leurs fonctions et à la bonne exécution des missions du service de santé des armées.

    • Le médecin des armées est libre de ses prescriptions mais il doit cependant les limiter à ce qui est nécessaire à l'efficacité du traitement. Sans négliger son devoir d'assistance morale, il ne doit pas, sauf circonstances exceptionnelles, entreprendre et poursuivre un traitement qu'il ne sent pas en mesure de mener à son terme avec une sécurité suffisante pour le malade.

    • Il appartient au médecin des armées, s'il ne dispose pas, en raison de la mission assignée au service médical de son unité, des moyens d'investigation ou de thérapeutique nécessaires au diagnostique et au traitement du malade placé sous sa responsabilité, de diriger celui-ci en temps utile soit sur un hôpital des armées, soit sur un hôpital civil ou militaire désigné par la malade, si celui-ci est libre d'exercer son choix, soit en cas de force majeure sur un établissement de soin le plus proche.

    • Aucun acte médical de nature à porter atteinte à l'intégrité corporelle ne peut être pratiqué sans motif très sérieux et, sauf cas d'urgence ou de force majeure, qu'après en avoir informé les intéressés, ou, le cas échéant, leurs représentants légaux, et avoir obtenu leur consentement.

      Aucun prélèvement d'organe ne peut être pratiqué, si ce n'est dans les cas et les conditions prévus par la loi.

    • Le médecin des armées doit s'assurer qu'il dispose d'une installation et de moyens techniques lui permettant de remplir convenablement sa mission ; si les conditions qui lui sont faites à cet égard risquent de compromettre la qualité des actes médicaux et des soins qu'il dispense, il doit en informer aussitôt les autorités hiérarchiques et techniques dont il relève, tout en consacrant ses efforts à l'amélioration de ces moyens et à la poursuite de sa mission.

    • L'exercice de la médecine au sein des armées comporte la rédaction par le médecin des divers certificats, attestations ou documents dont la réglementation en vigueur prescrit l'établissement. Tout certificat, attestation ou document délivré par un médecin doit mentionner son nom, son grade, sa fonction et comporter sa signature manuscrite. Lorsque des indications d'ordre médical y sont portées, ces documents sont couverts par le secret médical.

    • Dans ses ordonnances, le médecin des armées ne doit faire état que des indications suivantes :

      - le titre de docteur, les nom, prénoms et grade ;

      - les titres conférés et les fonctions confiées par décision du ministre de la défense

      - la qualification qui lui aura été reconnue dans les conditions de droit commun par les autorités habilitées ;

      - l'adresse du lieu d'exercice.

      Dans tous les autres cas, le médecin des armées se conforme aux règles de la correspondance militaire.

    • Le médecin des armées peut être tenu, à la demande du commandement, de contrôler ou d'expertiser un malade.

      Ces dispositions s'appliquent aussi bien au personnel qu'il soigne lui-même qu'à celui qui est traité par un praticien civil ou un autre médecin des armées en vertu du libre choix. Dans le premier de ces cas, il n'existe pas d'incompatibilité entre les fonctions de médecin traitant et celles de médecin expert d'un même malade, sous réserve des dispositions régissant la protection du secret médical.

    • L'inscription au tableau de l'ordre professionnel des médecins et des pharmaciens chimistes des armées en service détaché auprès d'un Etat étranger peut s'effectuer, lorsqu'elle est exigée par le pays d'accueil, après accord du ministre de la défense et sous réserve qu'il soit fait mention de l'état de médecin ou de pharmacien chimiste des armées. Cette inscription comporte pour l'intéressé l'obligation de respecter le code de déontologie applicable dans l'Etat où il sert.

    • Les médecins et les pharmaciens chimistes des armées en service hors des armées doivent refuser toutes obligations ou contraintes contraires aux principes généraux de l'éthique médicale et notamment aux dispositions faisant l'objet des articles 3, 4 et 5 du présent décret.

    • Dans le cas où le versement d'honoraires aux médecins ou aux pharmaciens chimistes des armées est autorisé, le partage de ces honoraires entre ces praticiens et l'Etat dans lequel ils exercent leurs activités résultent des conventions particulières passées avec cet Etat.

    • Lorsque des pharmaciens chimistes des armées affectés à des postes d'inspecteurs des pharmacies ont à se prononcer sur le respect de la législation pharmaceutique ou sur la délivrance de visas pour l'importation de spécialités pharmaceutiques, ils se conforment à la législation en vigueur dans l'Etat où ils servent.

    • Toute difficulté rencontrée par les médecins ou les pharmaciens chimistes armées servant hors des armées, portant sur les principes de morale médicale ou les règles de déontologie, doit être portée à la connaissance du ministre de la défense par l'intéressé.

    • Le médecin des armées qui adresse un malade à l'hôpital pour consultation ou admission doit exposer clairement, à l'aide des documents réglementaires, les motifs de sa demande.

      Le médecin consultant doit lui répondre dans les mêmes conditions et toujours sous sa propre signature.

    • Le médecin d'unité se tient informé de l'évolution de l'état de ses malades en traitement à l'hôpital. Le chef du service hospitalier doit lui fournir tous les renseignements à ce sujet. Au cas où celui-ci a prescrit un traitement ambulatoire à l'unité, la surveillance en revient au médecin d'unité.

    • L'autorité conférée aux grades est nécessaire à l'exercice des responsabilités attachées aux fonctions : c'est pourquoi les relations s'établissant entre médecins et pharmaciens chimistes servant comme officier de carrière d'une part, et médecins et pharmaciens chimistes accomplissant les obligations légales du service militaire actif ou celles de la disponibilité et de la réserve du service militaire d'autre part, obéissent aux règles normales de la hiérarchie. Elles s'inspirent également des devoirs traditionnels de confraternité et de considération réciproque.

    • Les rapports entre médecins et pharmaciens chimistes des armées et leurs homologues civils doivent s'établir dans un esprit de bonne confraternité, respectant les règles de la déontologie médicale et pharmaceutique et les dispositions du présent décret.

      Il est interdit de calomnier un praticien civil, de médire de lui ou de se faire l'écho de propos pouvant lui nuire dans l'exercice de sa profession. Les médecins et les pharmaciens chimistes des armées doivent en outre s'abstenir de prendre position dans les conflits s'élevant entre praticiens civils ou pouvant intervenir entre ceux-ci et les organismes chargés de les représenter.

    • Lorsqu'il agit en qualité de médecin contrôleur, le médecin des armées ne doit s'immiscer dans le traitement prescrit par un praticien civil ; s'il se trouve en désaccord avec lui au sujet du diagnostic, de la thérapeutique ou du pronostic, il doit le lui signaler personnellement et s'abstenir de tout commentaire à cet égard devant des tiers.

      Lorsque les malades sont des militaires soumis aux obligations du service national, des militaires de carrière ou des militaires servant sous contrat atteints d'une affection présumée imputable au service, les rapports entre le médecin des armées et les praticiens civils éventuellement consultés sont réglés par les dispositions des articles 52 à 53 du décret n° 59-506 du 28 juin 1979 portant code de déontologie médicale.

      Dans les mêmes conditions, les rapports des médecins des armées et des médecins des établissements assurant le service public hospitalier sont réglés par les dispositions de l'article 18 du décret du 14 mai 1974 susvisé.

    • Exceptionnellement, un malade en traitement dans un hôpital des armées peut, sur sa demande ou sur celle de sa famille, être examiné par un praticien civil, appelé à titre de consultant hospitalier ; le consultant proposé doit être agréé par le chef du service hospitalier concerné ; dans ce cas, la consultation se déroule dans les conditions précisées aux articles ci-après.

    • A la fin de la consultation, les conclusions rédigées en commun sont formulées par écrit, signées par le chef du service hospitalier et contresignées par le ou les médecins consultants, puis exposées au malade ou sa famille. Ce document doit être conservé au dossier du malade.

    • Quand, au cours d'une consultation entre médecins, les avis différent essentiellement, le médecin des armées, chef du service hospitalier, doit conserver sa liberté de jugement et d'action. Il ne peut se voir imposer une thérapeutique qu'il n'aurait pas choisie ou qu'il n'aurait pas les moyens d'assurer en toute sécurité.

      Si le malade ou la famille du malade ne partage pas son point de vue, le médecin chef du service hospitalier peut dégager sa responsabilité et celle du service en faisant application des mesures réglementaires prévues pour la sortie d'hôpital avant guérison.

    • Toutes situation conflictuelle survenant entre un organisme professionnel ou de protection sociale et un médecin ou un pharmacien chimiste des armées doit être portée immédiatement à la connaissance de l'autorité du service de santé des armées dont relève ce dernier.

    • Les médecins et les pharmaciens chimistes des armées doivent veiller à entretenir avec les autres professions de santé, vétérinaires biologistes des armées, chirurgiens-dentistes, officiers du corps technique et administratif du service de santé des armées et personnels paramédicaux, les relations de courtoisie et de collaboration indispensables à la bonne exécution des missions du service.

      Il appartient aux médecins et aux pharmaciens chimistes des armées de veiller notamment au maintien du niveau technique des personnels paramédicaux et d'assurer ou de faire assurer tout enseignement complémentaire nécessaire au perfectionnement de leurs connaissances.

      Ils doivent aussi veiller à ce que les personnels qui les assistent soient instruits de leurs obligations en matière de secret professionnel et s'y conforment.

    • Les relations que sont amenés à entretenir les médecins et les pharmaciens chimistes des armées avec les représentants des établissements privés de fabrication ou de vente de produits pharmaceutiques ou de matériels techniques doivent être empreintes de la plus stricte impartialité.

    • Les médecins et les pharmaciens chimistes des armées sont soumis à une double subordination, militaire et technique.

      Comme militaires, ils sont directement subordonnés aux autorités exerçant le commandement ou la direction des formations dans lesquelles ils sont affectés ou détachés.

      Comme techniciens, ils relèvent de la seule hiérarchie technique du service de santé des armées.

      Les ordres qu'ils reçoivent de ces autorités ne peuvent être contraires aux dispositions du présent décret.

      Ils sont soumis au règlement de discipline générale dans les armées et à son instruction d'application.

    • Les médecins et les pharmaciens chimistes des armées qui sont titulaires du diplôme d'Etat correspondant ne sont pas inscrits au tableau de l'ordre de leur profession ; cette inscription peut cependant être autorisée à titre temporaire et de façon exceptionnelle par le ministre de la défense, notamment lorsqu'il exercent leurs fonctions en dehors du département ministériel de la défense.

    • Les médecins et les pharmaciens chimistes des armées doivent, dans le respect de l'éthique professionnelle, tenir le commandement informé des résultats pratiques des constatations faites dans l'exercice de leurs activités, lorsqu'ils sont de nature à rendre nécessaires, dans l'intérêt du service ou dans l'intérêt du patient, des actions de médecine préventive ou curative, individuelle ou collective.

    • Les médecins et les pharmaciens chimistes des armées peuvent traiter librement, sans autorisation préalable, de toutes questions techniques relevant de leur compétence et ne constituant pas une source d'information dans un domaine sensible de la défense ; lorsque leurs publications écrites ou leurs communications orales ont une incidence militaire, ils doivent se conformer aux dispositions de l'article 7 du statut général des militaires.

    • Le conseil de déontologie médicale des armées est le garant de la permanence de l'éthique médicale au sein des armées.

      Dans le cas où une faute professionnelle a été commise, le conseil peut être saisi pour avis soit par l'autorité technique chargée de la qualification de cette faute, soit par le médecin ou le pharmacien chimiste des armées qui s'estimerait injustement atteint dans sa dignité, sa compétence ou son honneur professionnel, ou qui récuserait le caractère ou le degré de la faute professionnelle qui leur est reprochée.

      En toutes circonstances, le ministre de la défense peut saisir le conseil de toute question générale portant sur la déontologie ou sur l'éthique médicale au sein des armées.

    • Le conseil de déontologie médicale des armées est présidé par l'inspecteur général du service de santé des armées et comprend notamment les trois inspecteurs du service de santé pour l'armée de terre, pour la marine et pour l'armée de l'air.

      Dans le cas où il est appelé à donner son avis sur une faute professionnelle, un des inspecteurs techniques du service de santé peut être appelé à en faire partie sur désignation du ministre, en fonction du corps d'appartenance et de la qualification professionnelle de l'officier incriminé. Le conseil est tenu d'entendre l'officier concerné qui peut se faire assister d'un médecin ou d'un pharmacien chimiste des armées de son choix.

Par le Premier ministre : Raymond BARRE

Le ministre de la défense, Robert GALLEY

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