Version initiale


  • (LOI PORTANT DIVERSES DISPOSITIONS INSTITUTIONNELLES EN POLYNÉSIE FRANÇAISE)


    Le Conseil constitutionnel a été saisi, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, de la loi portant diverses dispositions institutionnelles en Polynésie française, sous le n° 2019-784 DC, le 27 mai 2019, par le Premier ministre.
    Au vu des textes suivants :


    - la Constitution ;
    - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
    - la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances ;
    - la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;
    - la loi organique portant modification du statut d'autonomie de la Polynésie française adoptée le 23 mai 2019 ;


    Au vu des observations du Gouvernement, enregistrées le 14 juin 2019 ;
    Et après avoir entendu le rapporteur ;
    Le Conseil constitutionnel s'est fondé sur ce qui suit :
    1. Le Premier ministre n'invoque aucun grief particulier à l'encontre de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel. Le projet dont cette loi est issue a, dans les conditions prévues à l'article 9 de la loi organique du 27 février 2004 mentionnée ci-dessus, fait l'objet d'une consultation de l'assemblée de la Polynésie française avant que le Conseil d'Etat ne rende son avis.


    - Sur l'article 1er :


    2. L'article 1er de la loi déférée modifie la loi du 27 février 2004 afin d'instituer, à compter de 2020, un prélèvement sur les recettes de l'Etat au bénéfice de la Polynésie française.
    3. Aux termes du dernier alinéa de l'article 6 de la loi organique du 1er août 2001 mentionnée ci-dessus : « Un montant déterminé de recettes de l'Etat peut être rétrocédé directement au profit des collectivités territoriales ou des Communautés européennes en vue de couvrir des charges incombant à ces bénéficiaires ou de compenser des exonérations, des réductions ou des plafonnements d'impôts établis au profit des collectivités territoriales. Ces prélèvements sur les recettes de l'Etat sont, dans leur destination et leur montant, définis et évalués de façon précise et distincte ».
    4. Si l'institution d'un prélèvement sur les recettes de l'Etat ne relève pas de la compétence exclusive des lois de finances et si la fixation du montant exact d'un tel prélèvement peut être renvoyée à une loi de finances, il résulte des dispositions organiques précitées que les dispositions créant un tel prélèvement doivent définir sa destination de façon précise.
    5. S'il est loisible à la loi ordinaire ou à la loi de finances de prévoir un prélèvement sur les recettes de l'Etat au bénéfice de la Polynésie française, en l'espèce, en se bornant à prévoir qu'un tel prélèvement est destiné « à couvrir les charges liées, pour cette collectivité d'outre-mer, aux déséquilibres d'ordre économique provoqués par l'arrêt des activités du centre d'expérimentation du Pacifique », sans indications suffisantes quant aux critères de détermination de ces charges, le législateur a méconnu l'article 6 de la loi organique du 1er août 2001. Dès lors, l'article 1er de la loi déférée est contraire à la Constitution.


    - Sur la place d'autres dispositions dans la loi déférée :


    6. Aux termes de la dernière phrase du premier alinéa de l'article 45 de la Constitution : « Sans préjudice de l'application des articles 40 et 41, tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis ».
    7. L'article 6 est relatif à la compétence des communes en matière de crématoriums.
    8. Les articles 10, 11, 12, 13 et 14 sont relatifs au droit successoral applicable en Polynésie française.
    9. L'article 15 est relatif aux conditions d'exploitation, en Polynésie française, d'un aérodrome relevant de la compétence de l'Etat.
    10. L'article 16 est relatif à l'exemption d'application en Polynésie française de la dépénalisation du stationnement payant.
    11. Introduites en première lecture, les dispositions des articles 6, 10, 11, 12, 13, 14, 15 et 16 ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles qui figuraient dans le projet de loi déposé sur le bureau du Sénat ni avec celles qui figuraient dans le projet de loi organique portant modification du statut d'autonomie de la Polynésie française déposé sur le bureau du Sénat et examiné concomitamment à ce premier projet de loi. Adoptées selon une procédure contraire à la Constitution, elles lui sont donc contraires.


    - Sur les autres dispositions :


    12. Le Conseil constitutionnel n'a soulevé d'office aucune autre question de conformité à la Constitution et ne s'est donc pas prononcé sur la constitutionnalité des autres dispositions que celles examinées dans la présente décision.
    Le Conseil constitutionnel décide :


  • Sont contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi portant diverses dispositions institutionnelles en Polynésie française :


  • - l'article 1er ;
    - les articles 6, 10, 11, 12, 13, 14, 15 et 16.


  • Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française.
    Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 27 juin 2019, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Valéry GISCARD d'ESTAING, Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. François PILLET et Michel PINAULT.
    Rendu public le 27 juin 2019.

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