Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance no 2001-670 du 25 juillet 2001 portant adaptation au droit communautaire du code de la propriété intellectuelle et du code des postes et télécommunications

Version initiale

  • Monsieur le Président,

    La loi no 2001-1 du 3 janvier 2001 a autorisé le Gouvernement à prendre, par ordonnances, les dispositions législatives nécessaires à la transposition de directives et à la mise en oeuvre du droit communautaire.

    La présente ordonnance met en oeuvre cette habilitation dans les domaines du droit de la propriété intellectuelle et du droit des télécommunications.

    Le titre Ier contient les dispositions qui modifient le code de la propriété intellectuelle.

    Il s'agit, en premier lieu, de procéder à la transposition de la directive 98/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 1998 sur la protection juridique des dessins et modèles.

    Sont ensuite prévues les mesures liées à la directive 89/104/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques.

    En troisième lieu, il est procédé aux adaptations qu'implique la mise en oeuvre du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, en date du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire.

    Enfin, viennent les modifications des dispositions relatives aux mandataires en propriété industrielle pour assurer leur compatibilité avec le principe de libre prestation des services posé par les articles 43 et 49 du traité instituant la Communauté européenne.

    Le code de la propriété intellectuelle étant applicable à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises, des dispositions propres à ces collectivités doivent être envisagées.

    Le titre II de la présente ordonnance achève la transposition de directives européennes relatives aux télécommunications.

    Il adapte le régime juridique des autorisations à la directive 97/13/CE du Parlement européen et du Conseil du 10 avril 1997 relative à un cadre commun pour les autorisations générales et les licences individuelles dans le secteur des services de télécommunications.

    Il transpose la directive 97/51/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 octobre 1997 modifiant les directives 90/387/CEE et 92/44/CEE en vue de les adapter à un environnement concurrentiel dans le secteur des télécommunications (directives ONP liaisons louées). Il transpose également la directive 98/10/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 1998 concernant l'application de la fourniture d'un réseau ouvert (ONP) à la téléphonie vocale et l'établissement d'un service universel des télécommunications dans un environnement concurrentiel. A cet effet, il procède notamment à quelques modifications des dispositions régissant le service universel des télécommunications.

    Il prévoit des mesures de transposition de la directive 97/66/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des télécommunications.

    Dans le domaine de l'interconnexion, il procède à la transposition de la directive 98/61/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 septembre 1998 modifiant la directive 97/33/CE pour ce qui concerne la portabilité du numéro et la présélection du transporteur et procède à quelques modifications de la législation relative à l'interconnexion pour assurer une stricte conformité à la directive 97/33/CE.

    Enfin, il transpose la directive 1999/5/CE du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 1999 concernant les équipements hertziens et les équipements terminaux de télécommunications et la reconnaissance mutuelle de leur conformité.

    TITRE Ier

    DROIT DE LA PROPRIETE INTELLECTUELLE

    Chapitre Ier

    Protection juridique des dessins ou modèles

    C'est la loi du 14 juillet 1909 qui a fixé le cadre juridique en matière de protection des dessins et modèles. Les dispositions de cette loi, aujourd'hui codifiées au livre V du code de la propriété intellectuelle, n'ont fait l'objet que de retouches limitées dans la loi du 26 novembre 1990 et dans la loi du 5 février 1994.

    La directive 98/71/CE, dont l'objet est d'assurer le bon fonctionnement du marché intérieur et d'éliminer les obstacles à la libre circulation des produits, s'est contentée d'harmoniser les dispositions nationales nécessaires à la réalisation de cet objectif, à savoir le principe de l'acquisition du droit par l'enregistrement, l'objet, la durée et l'étendue de la protection des dessins et modèles. Elle laisse à l'initiative des Etats membres les modalités procédurales d'obtention et de mise en oeuvre des droits.

    La transposition proposée se limite aux seules parties du code qui sont affectées par la législation communautaire. Elle n'apporte donc aucune modification au titre II du livre V du code de la propriété intellectuelle, relatif au contentieux en matière de dessins et modèles.

    La transposition est effectuée dans le respect des concepts du texte communautaires et, très largement, de sa formulation même.

    Par souci de clarté, il est proposé de réécrire entièrement le titre Ier du livre V (article 1er de l'ordonnance), même si trois articles du titre actuellement en vigueur ne subissent aucune modification. La structure du titre est conservée, les chapitres Ier et II étant divisés en deux sections. Les intitulés du titre et des chapitres ont été modifiés dans un souci de concordance avec leur nouveau contenu.

    Il faut souligner, sur le fond, que la directive n'est pas en opposition avec le droit en vigueur. En particulier, lorsque la protection des dessins et modèles est assurée non seulement par une législation spécifique mais aussi, comme c'est le cas à des degrés divers dans la plupart des Etats membres, par la législation sur le droit d'auteur, ce deuxième mécanisme de protection n'est nullement affecté par le texte communautaire.

    En conséquence, la règle, traditionnelle en France, du cumul total de protection entre le droit d'auteur et le droit spécifique sur les dessins et modèles, règle issue de la théorie de l'unité de l'art, est entièrement maintenue. Le principe en est expressément affirmé par le nouvel article L. 513-2 qui réserve expressément l'application des livres Ier et III du code de la propriété intellectuelle.

    Ainsi, dans la mesure où l'enregistrement d'un dessin ou d'un modèle constituera la formalité attributive du droit conféré par le livre V, le déposant pourra toujours se prévaloir du droit d'auteur, notamment pour la période antérieure au dépôt s'il est le créateur du dessin ou du modèle.

    Le texte de transposition fait l'objet d'un consensus de la part des milieux concernés, industriels et conseils spécialisés.

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    « Chapitre Ier

    Le chapitre Ier du titre Ier du livre V du code de la propriété intellectuelle est celui qui est le plus affecté par la directive.

    La première section, relative à l'objet de la protection (domaine, conditions, exclusions), reproduit largement les articles 3 à 8 de la directive.

    Comme le texte communautaire fait porter la protection sur l'apparence extérieure du produit et non sur le produit lui-même, il est nécessaire d'adopter une nouvelle formulation pour définir l'objet de la protection dans l'article L. 511-1. Le champ des produits concernés est vaste. Les programmes d'ordinateur en sont cependant exclus.

    Les conditions de protection sont sensiblement affectées par la directive. La protection est désormais subordonnée à la réunion de deux conditions : la nouveauté et le caractère propre (art. L. 511-2).

    Le concept de nouveauté (art. L. 511-3) présente deux différences essentielles par rapport à l'état actuel de notre droit. Tout d'abord, les divulgations qui sont le fait du créateur ou de son ayant droit lui sont opposables, ce qui est actuellement exclu. Seule une divulgation antérieure de moins d'un an au dépôt fera exception.

    En revanche, certaines divulgations effectuées par des tiers deviennent inopposables. C'est le cas, tout d'abord, de celles qui ne pouvaient être raisonnablement connues des milieux spécialisés du secteur concerné. La formulation proposée pour l'article L. 511-6 est largement reprise de la directive, à l'exception du dernier alinéa de cet article qui est une disposition de nature transitoire.

    Plus sensible, au moins dans la forme, est l'innovation constituée par le critère du caractère propre (art. L. 511-4). La protection d'un dessin ou d'un modèle requiert désormais que la forme revendiquée présente des caractéristiques telles que l'impression globale produite sur l'observateur averti diffère de celle produite par tout autre dessin ou modèle divulgué antérieurement.

    L'article L. 511-5 ajoute une condition supplémentaire lorsqu'est en cause la protection d'une catégorie particulière de produits : les pièces de produits complexes. Il s'agit d'éléments qui ont vocation à être démontés et remontés ou, plus généralement, qui peuvent être remplacés. Outre que ces pièces doivent remplir individuellement les conditions générales de protection, elles doivent également, pour être susceptibles de protection, rester visibles lors d'une utilisation normale du produit par l'utilisateur final. Ainsi, par exemple, les pièces d'une automobile qui sont placées sous le capot ne pourront plus faire l'objet d'une protection.

    Cette condition supplémentaire s'explique, outre des considérations économiques tirées de préoccupations de concurrence, par le souci de réserver la protection à des créations portant sur l'aspect extérieur des produits.

    Le souci de concurrence et le refus de la protection des créations exclusivement fonctionnelles se retrouvent à l'article L. 511-8 qui exclut les caractéristiques de l'apparence qui sont exclusivement imposées par la fonction technique du produit. Il s'agit ici d'une autre formulation du critère, traditionnellement retenu par la jurisprudence, selon lequel n'est pas protégeable la forme inséparable d'un résultat utile.

    Sont également exclus par le même article les produits dits d'interconnexion, dont la forme est conçue pour s'adapter exactement à un autre produit de manière à ce que chaque produit puisse remplir sa fonction.

    La seconde section du chapitre Ier pose le principe selon lequel la protection d'un dessin ou modèle s'acquiert par l'enregistrement et non plus du fait de la création comme par le passé.

    Le régime juridique des dessins et modèles, en tant qu'objets d'un droit de propriété industrielle, est ainsi entièrement aligné sur celui des brevets et des marques, dont la protection est également acquise à partir de leur dépôt.

    L'articulation entre droit d'auteur et droit de propriété industrielle sur les dessins et modèles n'est toutefois aucunement remise en cause. C'est pourquoi l'affirmation du principe de l'acquisition par la formalité à l'article L. 511-9 doit être assortie de la reconnaissance du droit du créateur sur son dessin ou modèle et d'un mécanisme de revendication de propriété à l'encontre des enregistrements obtenus de manière frauduleuse ou abusive (art. L. 511-10).

    « Chapitre II

    La principale modification apportée à ce chapitre réside dans l'adjonction d'une section relative à la nullité de l'enregistrement d'un dessin ou modèle.

    L'article L. 512-4 du code de la propriété intellectuelle, qui transpose une partie de l'article 11 de la directive, prévoit que l'enregistrement peut être annulé s'il porte atteinte au droit d'auteur d'un tiers ou si le dessin ou modèle fait usage d'un signe distinctif, notamment d'une marque, qui appartient à un tiers. La directive autorise en effet les Etats à prévoir de telles causes de nullité.

    « Chapitre III

    La durée du droit conféré par l'enregistrement est sensiblement diminuée par rapport au droit en vigueur, en application de l'article 10 de la directive. L'article L. 513-1 la limite à vingt-cinq ans.

    Cette diminution de la durée de protection implique que l'on précise pendant combien de temps seront protégés les dépôts effectués avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance. De nature transitoire, cette disposition est toutefois appelée à s'appliquer pendant un quart de siècle. C'est pourquoi il est proposé de l'intégrer dans le code de la propriété intellectuelle, sous la forme d'un second alinéa de l'article L. 513-1.

    Quant au droit conféré, sa consistance n'est pas affectée par la transposition de la directive. En effet, tous les dessins et modèles qui remplissent les conditions de protection jouissent de la même protection (art. 12 et 13 de la directive).

    Les articles L. 513-4 et L. 513-5 confèrent aux dessins et modèles la protection contre tous actes non autorisés de fabrication, importation, commercialisation, utilisation d'un dessin ou modèle identique ou qui ne produit pas sur l'observateur averti une impression visuelle globale différente. En conséquence, la rédaction de l'article L. 513-2 s'inspire du droit des marques et pose en principe que l'enregistrement du dessin ou modèle confère à son titulaire un droit absolu qualifié de droit de propriété. Cette rédaction fait aussi référence aux autres droits dont peut bénéficier le titulaire d'un dessin et modèle, en particulier le droit d'auteur.

    Parmi les exceptions au droit conféré qui sont prévues à l'article L. 513-6, deux sont traditionnelles en matière de propriété industrielle, notamment dans le domaine des brevets. Il s'agit des actes accomplis à titre privé et à des fins non commerciales ainsi que des actes accomplis à des fins expérimentales. La troisième est plus novatrice. Il s'agit de la reproduction à des fins d'illustration ou d'enseignement.

    L'article L. 513-8 introduit l'épuisement du droit, exception au droit conféré visant à assurer la libre circulation des produits protégés par un dessin ou modèle mis en circulation dans un Etat membre de la Communauté européenne ou dans un Etat partie à l'Espace économique européen, par le titulaire ou avec son consentement.

    « Chapitre IV

    L'ancien article L. 511-7 du code de la propriété intellectuelle est transféré, sans changement substantiel de rédaction, au chapitre IV. L'intitulé du chapitre est modifié en conséquence.

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    Chapitre II

    Protection juridique des marques

    Les observations adressées par la Commission européenne aux autorités françaises concernant la transposition de la directive no 89/104/CEE du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques ont révélé que les dispositions actuelles de l'article L. 714-1 du code de la propriété intellectuelle n'étaient pas en totale conformité avec celles de l'article 8 (2) de la directive précitée.

    En effet, l'article L. 714-1 permet au propriétaire d'une marque d'invoquer son droit de propriété à l'encontre d'un licencié qui enfreint les limites de sa licence, sans préciser les clauses concernées comme le fait l'article 8 (2) de la directive. Ceci pourrait impliquer qu'en droit français la vente en dehors du territoire concédé constitue une contrefaçon de marque alors que, selon la directive, seule l'apposition de la marque en dehors du territoire couvert par la licence constitue une contrefaçon.

    Le nouvel article L. 714-1 proposé assure la conformité totale du code de la propriété intellectuelle à la directive (article 2 de l'ordonnance).

    Chapitre III

    Marques communautaires

    Le règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire a institué un titre unitaire jouissant d'une protection uniforme dans tous les Etats membres de la Communauté.

    Ce règlement, outre qu'il fixe le régime juridique de ce titre, impose aux Etats membres un certain nombre d'obligations en terme de désignation d'autorités compétentes, quant au statut de la marque communautaire sur leur territoire et quant à certaines relations entre marque communautaire et marque nationale. Il convient donc de procéder aux adaptations nécessaires du code de la propriété intellectuelle (article 3 de l'ordonnance).

    a) Désignation des tribunaux des marques communautaires :

    Selon l'article 91 du règlement sur la marque communautaire, les Etats membres doivent désigner sur leur territoire un nombre aussi limité que possible de juridictions nationales de première instance et d'appel en tant que « tribunaux des marques communautaires ». Cette désignation aurait dû intervenir au plus tard le 15 mars 1997. Afin de pouvoir y procéder par décret en Conseil d'Etat, il est nécessaire d'inscrire dans la loi la possibilité pour le pouvoir réglementaire de conférer, comme pour les marques nationales, la compétence exclusive à certaines juridictions. C'est ce que propose le nouvel article L. 717-4.

    b) Désignation de l'autorité compétente pour apposer la formule exécutoire :

    L'article L. 717-7 désigne l'INPI pour apposer la formule exécutoire sur les décisions de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (OHMI) fixant le montant des frais mis à la charge de la partie perdante dans une procédure devant cet office.

    c) Application du droit national aux atteintes à la marque communautaire :

    Il s'agit ici des sanctions civiles et pénales de la contrefaçon ainsi que des mesures de retenue aux frontières. Les nouveaux articles L. 717-1 et L. 717-2 font donc application aux marques communautaires du régime des marques nationales, et ce par simple référence aux articles pertinents.

    d) Relations entre marques communautaires et marques nationales :

    Transformation de la marque communautaire en marque nationale :

    Les articles 108 à 110 du règlement sur la marque communautaire prévoient la possibilité de transformer une demande ou une marque communautaire en demande de marque nationale. Ce cas se présente notamment lorsque la demande de marque communautaire est rejetée, retirée ou réputée retirée, ou que la marque communautaire cesse de produire ses effets en raison d'une nullité, d'une déchéance ou d'une renonciation.

    Il est donc nécessaire de déterminer l'étendue de l'examen auquel devra procéder l'Institut national de la propriété industrielle après transmission de la demande par l'OHMI. Le nouvel article L. 717-5 prévoit que la marque transformée fera l'objet d'un examen des conditions intrinsèques de validité et sera soumise à opposition. Toutefois, si la marque transformée avait revendiqué l'ancienneté d'une marque française, elle sera enregistrée sans examen ni procédure d'opposition.

    Marque nationale dont l'ancienneté bénéficie à une marque communautaire :

    Selon les articles 34 et 35 du règlement sur la marque communautaire, l'ancienneté d'une marque nationale peut être revendiquée par une marque communautaire. Le titulaire de la marque communautaire peut alors se prévaloir de l'ancienneté de la marque nationale antérieure dans l'Etat membre où cette dernière a été enregistrée.

    Cette ancienneté disparaît si la marque nationale est déclarée déchue ou nulle. Un tiers pourra donc avoir intérêt à demander la déchéance ou la nullité de la marque nationale - même si elle a été retirée ou non renouvelée.

    Il est donc nécessaire de prévoir - comme le fait l'article 14 de la première directive du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des Etats membres sur les marques - qu'il est possible de demander la déchéance ou la nullité d'une marque nationale retirée ou non renouvelée lorsque l'ancienneté de cette marque a été invoquée pour une marque communautaire. Toutefois, la déchéance ne pourra être prononcée que si elle était encourue à la date du retrait ou à la date d'expiration de la marque. C'est ce à quoi procède le nouvel article L. 717-6.

    Tolérance du titulaire de la marque communautaire :

    L'article 53 du règlement sur la marque communautaire prévoit qu'un titulaire d'une marque communautaire perd le droit de se prévaloir de celle-ci contre une autre marque communautaire dont il a toléré l'utilisation pendant cinq ans. La même règle est appliquée à une marque nationale antérieure par rapport à une marque communautaire postérieure.

    L'article L. 716-5 du code règle déjà le cas de la tolérance entre titulaires de marques nationales. Il convient de compléter le dispositif en prévoyant le cas de forclusion par tolérance du titulaire de la marque communautaire antérieure par rapport à une marque nationale postérieure conformément à l'article 9 de la directive sur les marques précitée. C'est l'objet du nouvel article L. 717-3.

    Chapitre IV

    Liberté de prestation de service à titre occasionnel pour les mandataires en propriété industrielle sur le territoire de la Communauté européenne ou dans l'Espace économique européen

    Par lettres du 15 mai 1998 et du 6 août 1999, la Commission européenne a appelé l'attention du Gouvernement français sur diverses dispositions du code de la propriété intellectuelle, notamment l'article L. 422-4, qui soulèveraient des problèmes de compatibilité avec le principe fondamental de la libre prestation de services posé par les articles 49 et 55 du traité instituant la Communauté européenne.

    Dans ces deux lettres, la Commission a notamment reproché à la France d'imposer à toute personne qui n'a pas son domicile, son siège ou un établissement sur le territoire national d'être représentée dans la procédure devant l'Institut national de la propriété industrielle (INPI) par un conseil en propriété industrielle, professionnel inscrit sur une liste nationale et ayant un domicile professionnel en France.

    La Commission a émis un avis motivé le 24 janvier 2000. Afin de mettre le texte en conformité avec les obligations communautaires, il est proposé d'ajouter à la liste des personnes habilitées à représenter des clients devant l'INPI les professionnels des Etats membres intervenant à titre occasionnel et habilités à le faire devant leur office national.

    Ce même souci de conformité au traité conduit également à abroger le second alinéa de l'article L. 712-2 du code de la propriété intellectuelle qui prévoit qu'un déposant de marque domicilié à l'étranger doit faire élection de domicile en France (article 4 de l'ordonnance).

    Cet alinéa étant au demeurant de nature réglementaire, il conviendra de préciser ultérieurement par décret qu'un dépôt peut être effectué par un déposant ayant son domicile dans la Communauté ou dans un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen.

    Chapitre V

    Dispositions relatives à l'outre-mer

    La marque communautaire emporte les mêmes effets juridiques sur le territoire français qu'une marque nationale. Il est donc nécessaire qu'elle ait la même portée géographique que le dispositif de droit interne, c'est-à-dire que son application soit étendue aux collectivités françaises qui ont le statut de « pays ou territoire d'outre-mer » au regard du traité instituant la Communauté européenne.

    C'est pourquoi l'article 7 de l'ordonnance complète le livre VIII du code de la propriété intellectuelle, qui contient les dispositions propres à l'outre-mer, en ajoutant un article L. 811-4 qui donne à la marque communautaire la même valeur que la marque nationale dans les collectivités régies par le principe de spécialité législative. Comme le règlement (CE) no 40/94 ne s'applique pas en tant que tel dans ces collectivités, il est procédé à la transcription des articles pertinents du texte communautaire.

    Par ailleurs, il apparaît souhaitable de rectifier la rédaction des autres articles du livre VIII du code de la propriété intellectuelle relatifs à l'outre-mer afin de faire apparaître la dénomination géographique des collectivités concernées plutôt que de désigner celles-ci par leur statut juridique (art. 6 de l'ordonnance).

    TITRE II

    DROIT DES TELECOMMUNICATIONS

    Le marché des télécommunications fait aujourd'hui l'objet d'une réglementation européenne détaillée qui se traduit par de nombreuses directives. Celles-ci ont, pour la plupart, été adoptées pour fixer le cadre dans lequel s'exercerait pleinement la concurrence, à compter du 1er janvier 1998. La majeure partie de ces directives ouvrant le secteur à la concurrence a été transposée en droit interne grâce à la loi no 96-659 du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications et à ses textes d'application.

    Toutefois, en raison des contraintes de la négociation communautaire, certaines des directives du « paquet 1998 » n'ont pu être adoptées que peu de temps avant l'échéance du 1er janvier 1998, voire postérieurement à celle-ci. Ces directives n'ont, évidemment, pas pu être prises en compte dans la préparation de la loi de réglementation des télécommunications. Par ailleurs, certaines directives en négociation, dont la loi de 1996 assurait par anticipation la transposition, ont été adoptées ultérieurement avec des modifications issues des débats dans les instances communautaires. Il faut donc retoucher légèrement la loi nationale pour intégrer ces amendements de fin de négociation.

    Le titre II du présent projet d'ordonnance a ainsi pour objet d'achever la transposition des directives européennes relatives aux télécommunications.

    L'adoption définitive de la directive « licences » (1) conduit à apporter quelques précisions au régime juridique des autorisations, dont les grandes lignes demeurent cependant inchangées.

    En premier lieu, le principe selon lequel les taxes liées aux autorisations (taxes de constitution de dossier et taxes de gestion et de contrôle des autorisations) sont destinées uniquement à couvrir les frais administratifs afférents à la délivrance, à la gestion et au contrôle des autorisations est incorporé aux articles L. 33-1 et L. 33-2 du code des postes et télécommunications. Bien entendu, ce principe ne s'applique pas aux redevances perçues pour l'utilisation du domaine public des fréquences radioélectriques (art. 8).

    En deuxième lieu, il convient d'aligner sur les dispositions de la directive le délai au terme duquel l'autorisation d'établir un réseau indépendant qui n'utilise pas de fréquences assignées à son exploitant est accordée tacitement (art. 9) ainsi que les délais prévus au point 4 de l'article 9 de la directive 97/13/CE, encadrant les conditions dans lesquelles un opérateur qui ne remplit pas ses obligations peut être sanctionné par l'autorité réglementaire nationale. La fixation de ces délais relevant du pouvoir réglementaire, l'ordonnance se borne à renvoyer leur détermination à un décret prévu à l'article L. 36-11 du code des postes et télécommunications (art. 10).

    La directive 98/61/CE (2) relative à la portabilité du numéro et à la présélection du transporteur a introduit des modifications importantes dans la directive 97/33/CE relative à l'interconnexion des réseaux de télécommunications (3). Les exploitants de réseaux puissants sur le marché de la téléphonie fixe doivent mettre en place la présélection du transporteur à compter du 1er janvier 2000. En outre, les Etats membres ont la possibilité d'imposer cette obligation à d'autres opérateurs.

    L'obligation de fournir la présélection ne s'appliquant pas nécessairement à tous les opérateurs puissants mais uniquement à ceux qui sont influents dans le secteur de la téléphonie fixe, il convient de différencier les obligations en fonction du marché sur lequel chacun intervient.

    Dans cette optique, il est proposé que plusieurs listes d'opérateurs puissants soient établies par l'Autorité de régulation des télécommunications (art. 13), des obligations distinctes étant associées à chaque catégorie (III de l'article 11) :

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    Vous pouvez consulter le tableau dans le JO

    n° 173 du 28/07/2001 page 12127 à 12132

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    Par ailleurs, en plus de quelques modifications destinées à assurer un alignement strict du droit national sur la directive « interconnexion » (I et II de l'article 11 et art. 14), il est proposé de transposer la possibilité pour l'Autorité de régulation des télécommunications d'intervenir de sa propre initiative dans les négociations d'interconnexion entre opérateurs afin de définir soit les sujets qui doivent être traités dans l'accord d'interconnexion, soit les conditions que doit remplir cet accord (III de l'article 11, créant un VI à l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications).

    Il est proposé en outre de transposer l'obligation de prendre en compte, dans l'évaluation des coûts nets des obligations de service universel, l'avantage sur le marché qu'en retirent les opérateurs soumis à ces obligations (art. 12).

    Les directives « ONP liaisons louées » et « ONP téléphonie vocale » encadrent les conditions de fourniture des liaisons louées et du service téléphonique au public, qui sont des composantes importantes du service public des télécommunications. Adoptées au début des années 1990, ces directives s'appliquaient alors, très naturellement, aux opérateurs en situation de monopole. Les modifications nécessaires pour tenir compte de l'ouverture du marché à la concurrence ont été effectuées par la directive 97/51/CE (4), pour les liaisons louées, et par la directive 98/10/CE (5), pour la téléphonie vocale.

    La directive « ONP liaisons louées » modifiée prévoit qu'en chaque point du territoire au moins un opérateur doit être soumis aux obligations qu'elle comporte, cet opérateur devant être choisi parmi les opérateurs puissants sur le marché des liaisons louées, s'il en existe. Un mécanisme de désignation par le ministre chargé des télécommunications des opérateurs tenus à ces obligations est donc prévu (art. 15).

    L'adoption de la directive « ONP téléphonie vocale » conduit à apporter quelques retouches aux dispositions régissant le service universel des télécommunications.

    Cette directive prévoit ainsi que les opérateurs sont tenus de fournir leur liste d'abonnés à un tarif orienté vers les coûts à toute personne qui en fait la demande, afin de garantir la disponibilité d'un annuaire universel et d'un service de renseignements universel. Il est proposé de rajouter cette obligation à l'article L. 33-4 du code des postes et télécommunications. Une procédure de règlement des litiges concernant les conditions de fourniture des listes par l'Autorité de régulation des télécommunications, similaire à ce qui existe déjà dans le domaine de l'interconnexion, est prévue. Elle se justifie pleinement compte tenu de la complexité technique du sujet (art. 17).

    L'obligation de fourniture des listes d'abonnés devrait permettre d'assurer l'édition d'un annuaire universel.

    La loi de réglementation des télécommunications de 1996 a prévu qu'un organisme indépendant des opérateurs devrait établir la liste d'abonnés nécessaire à l'édition de l'annuaire universel. Cet organisme n'a pu être créé en raison des doutes entourant sa viabilité économique. L'obligation de fourniture des listes d'abonnés, instituée par la présente ordonnance, permettra à France Télécom de remplir l'obligation qui lui incombe d'éditer un annuaire universel en se procurant les listes d'abonnés auprès des opérateurs concernés. En conséquence, il est proposé de supprimer l'organisme indépendant qui n'a pu être créé et n'apparaît plus indispensable (art. 19).

    La directive « ONP téléphonie vocale » modifiée prévoit par ailleurs qu'un organisme doit avoir le pouvoir de demander aux opérateurs de modifier leurs contrats types ou les modalités de compensation des abonnés en cas de non-respect du service contractuel lorsque ceux-ci ne sont pas conformes à la réglementation en vigueur. Il est proposé, afin de protéger les droits des abonnés et des utilisateurs, que l'Autorité de régulation des télécommunications qui implicitement dispose déjà de cette faculté dans le cadre de ses pouvoirs de sanction, assure cette mission (I de l'article 18).

    Cette directive édicte enfin des obligations qui s'imposent à tous les opérateurs puissants sur le marché de la téléphonie fixe : orientation des tarifs vers les coûts et séparation comptable, contrôle de la qualité de service, fourniture d'une offre avancée de services de téléphonie vocale (II de l'article 18).

    La protection des données personnelles et de la vie privée constitue une des préoccupations majeures des citoyens dans le cadre du développement de la société de l'information. La prise en compte de cet enjeu par les institutions communautaires a conduit à l'adoption d'une directive spécifique portant sur la protection des données dans le secteur des télécommunications (6).

    Cette directive prévoit notamment que les appels non sollicités effectués à des fins de prospection commerciale au moyen d'automates d'appel ou de télécopieurs ne peuvent être autorisés que s'ils concernent des abonnés qui ont donné leur accord pour recevoir ce type d'appels. Il est donc proposé que les abonnés puissent signaler à l'opérateur auprès duquel ils sont abonnés qu'ils consentent à faire l'objet de démarchage publicitaire au moyen d'automates d'appel ou de télécopieurs. Les opérateurs sont tenus de communiquer la liste de ces abonnés à toute personne qui en fait la demande (art. 16).

    La directive 1999/5/CE (7), qui remplace les directives 91/263/CEE (concernant les équipements terminaux de télécommunications) et 93/97/CEE (concernant les équipements de stations terrestres de communication par satellite), bouleverse les règles applicables aux équipements radioélectriques et aux équipements terminaux de télécommunications. Elle atténue, en effet, sensiblement les contraintes des réglementations régissant la commercialisation, la circulation et la mise en service de ces équipements, grâce au remplacement de l'agrément préalable par une déclaration de conformité du fabricant.

    Sa transposition nécessite une refonte de l'article L. 34-9 du code des postes et télécommunications (art. 23), ainsi qu'une modification de la définition des exigences essentielles auxquelles doivent satisfaire les équipements radioélectriques et les équipements terminaux ainsi que les services relevant de l'article L. 34-2 (art. 20 et 22). Elle implique également une modification des compétences de l'Autorité de régulation des télécommunications, qui ne sera plus un organisme notifié, c'est-à-dire un organisme intervenant dans l'évaluation de la conformité des équipements aux exigences essentielles (art. 24). Le rôle des organismes notifiés sera par ailleurs profondément transformé.

    La suppression de l'intervention a priori des pouvoirs publics, à travers l'agrément, renforce l'importance de la surveillance du marché, notamment dans le domaine des matériels radioélectriques. Dans cette perspective, il est proposé de sanctionner pénalement l'utilisation non autorisée d'une fréquence radioélectrique (art. 25) et de permettre aux agents des douanes de participer aux activités de surveillance du marché (art. 26).

    Par ailleurs, la directive 1999/5/CE prévoit une procédure de publication par les opérateurs des interfaces d'accès à leurs réseaux, en vue de faciliter le développement d'équipements terminaux par les industriels. La mise en oeuvre de cette disposition implique que soit défini le point de terminaison du réseau, qui matérialise l'interface. Il est donc proposé d'inclure dans le code des postes et télécommunications une définition générique de ce point et de prévoir la possibilité pour l'Autorité de régulation des télécommunications d'en préciser la position par des décisions à caractère réglementaire (art. 20).

    Enfin, la directive 1999/5/CE doit être transposée à la lumière de la recommandation européenne du 12 juillet 1999 relative à la limitation de l'exposition du public aux champs électromagnétiques. Ce texte recommande en effet d'imposer aux opérateurs le respect de valeurs limites d'exposition du public lorsqu'ils implantent des stations radioélectriques.

    C'est pourquoi la définition des exigences essentielles auxquelles doivent satisfaire les équipements radioélectriques et les équipements terminaux, dont la modification est imposée par la directive afin d'englober explicitement la santé, doit être complétée pour préciser qu'un décret peut fixer des valeurs limites d'exposition du public aux champs électromagnétiques (art. 20).

    Les opérateurs de télécommunications devront respecter certaines prescriptions pour l'implantation de leurs équipements, de manière à garantir que ces derniers ne présentent aucun danger pour les populations vivant aux alentours (art. 21). A ce titre, il est prévu que les cahiers des charges des opérateurs mobiles comprendront des dispositions relatives à l'implantation des stations de base, comme, par exemple, l'obligation de respecter certains périmètres de sécurité.

    La directive 1999/64/CE (8) a complété le dispositif juridique destiné à assurer une concurrence loyale sur le marché des télécommunications, en prévoyant que les opérateurs qui disposent à la fois d'une position dominante sur le marché de la téléphonie fixe et de droits exclusifs ou spéciaux pour l'exploitation de réseaux câblés de télédistribution sont tenus de filialiser cette dernière activité.

    Bien que les dispositions de la directive 1999/64/CE soient déjà respectées en fait par les opérateurs français - notamment par France Télécom, dont les activités dans le domaine du câble sont aujourd'hui logées dans des filiales -, il apparaît nécessaire de procéder à une transposition explicite de la directive (art. 28).

    Enfin, il est prévu de tirer les conséquences de la création, par la loi no 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte, d'un article L. 129 du code des postes et télécommunications qui prévoit que ce code est applicable à Mayotte (art. 27). Dans les autres collectivités d'outre-mer régies par le principe de la spécialité législative (Polynésie française, îles Wallis-et-Futuna, Terres australes et antarctiques françaises et Nouvelle-Calédonie) seules les dispositions concernant l'Agence nationale des fréquences prévues à l'article L. 97-1 de ce même code sont applicables.

    Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation.

    Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.

(1) Directive 97/13/CE du Parlement européen et du Conseil du 10 avril 1997 relative à un cadre commun pour les autorisations générales et les licences individuelles dans le secteur des services de télécommunications.

(2) Directive 98/61/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 septembre 1998 modifiant la directive 97/33/CE pour ce qui concerne la portabilité du numéro et la présélection du transporteur.

(3) Directive 97/33/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 1997 relative à l'interconnexion dans le secteur des télécommunications en vue d'assurer un service universel et l'interopérabilité par l'application des principes de la fourniture d'un réseau ouvert (ONP).

(4) Directive 97/51/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 octobre 1997 modifiant les directives 90/387/CEE et 92/44/CEE en vue de les adapter à un environnement concurrentiel dans le secteur des télécommunications.

(5) Directive 98/10/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 1998 concernant l'application de la fourniture d'un réseau ouvert (ONP) à la téléphonie vocale et l'établissement d'un service universel des télécommunications dans un environnement concurrentiel.

(6) Directive 97/66/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des télécommunications.

(7) Directive 1999/5/CE du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 1999 concernant les équipements hertziens et les équipements terminaux de télécommunications et la reconnaissance mutuelle de leur conformité.

(8) Directive 1999/64/CE de la Commission du 23 juin 1999 modifiant la directive 90/388/CEE en vue de garantir que les réseaux de télécommunications et les réseaux câblés de télévision appartenant à un seul et même opérateur constituent des entités juridiques distinctes.

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