Ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l'extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte

NOR : INTX0100166R
ELI : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/ordonnance/2002/2/7/INTX0100166R/jo/texte
Alias : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/ordonnance/2002/2/7/2002-149/jo/texte
JORF n°0034 du 9 février 2002
Texte n° 28

Version initiale


Le Président de la République,
Sur le rapport du Premier ministre, du ministre de l'intérieur et de la ministre de l'emploi et de la solidarité,
Vu la Constitution, et notamment ses articles 38 et 72 ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu l'ordonnance n° 91-246 du 25 février 1991 relative au code du travail applicable dans la collectivité départementale de Mayotte ;
Vu l'ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 modifiée relative à l'amélioration de la santé publique à Mayotte, ratifiée par la loi n° 98-144 du 6 mars 1998 ;
Vu l'ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers à Mayotte ;
Vu la loi n° 2001-503 du 12 juin 2001 portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer ;
Vu la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte ;
Vu l'avis du conseil général de Mayotte en date du 27 décembre 2001 ;
Vu l'avis de la Caisse nationale des allocations familiales en date des 11 décembre 2001 et 8 janvier 2002 ;
Le Conseil d'Etat entendu ;
Le conseil des ministres entendu,
Ordonne :


  • Il est créé un régime de base obligatoire pour les prestations familiales dans la collectivité départementale de Mayotte. Il s'inscrit dans le principe général de solidarité nationale défini à l'article L. 111-1 du code de la sécurité sociale.


  • Les prestations familiales comprennent :
    1° Les allocations familiales ;
    2° L'allocation de rentrée scolaire ;
    3° L'allocation de logement.


  • Toute personne française ou étrangère résidant dans la collectivité départementale de Mayotte, ayant à sa charge effective et permanente un ou plusieurs enfants résidant à Mayotte, bénéficie des prestations familiales dans les conditions prévues par le présent chapitre.


  • Bénéficient des prestations familiales les étrangers titulaires de la carte de résident prévue aux articles 13, 19 et 20 de l'ordonnance du 26 avril 2000 susvisée, ainsi que les étrangers en situation régulière et qui détiennent un titre de séjour mentionné au II de l'article 59 de ladite ordonnance, sous réserve du respect de la condition de la résidence prévue au premier alinéa de l'article 19 de la même ordonnance.


  • Sous réserve des règles particulières à chaque prestation, ouvre droit aux prestations familiales tout enfant dont la filiation est établie avec au moins l'un de ses deux parents, jusqu'à la fin de l'obligation scolaire et, s'il poursuit des études, jusqu'à un âge limite, à la condition qu'il ne perçoive aucun revenu professionnel.
    Toutefois, l'enfant ne doit pas être bénéficiaire, à titre personnel, d'une ou plusieurs prestations prévues au présent chapitre.


  • Les prestations familiales sont dues à la personne qui assume la charge effective et permanente de l'enfant qui a la qualité d'allocataire. Cette personne est la mère légitime, naturelle ou adoptive de l'enfant ou, à défaut, soit le père, soit la personne qui assume cette charge par décision de justice.
    La qualité d'allocataire n'est reconnue qu'à une seule personne au titre d'un même enfant.
    Sauf en matière d'allocation de logement, le versement des prestations familiales est subordonné, selon l'âge des enfants, à la production de certificats en matière de santé et de scolarité.


  • Les allocations familiales sont attribuées en fonction du nombre d'enfants à charge, à partir du premier enfant, dans la limite de trois enfants par allocataire.


  • Une allocation de rentrée scolaire est attribuée pour chaque enfant inscrit dans un établissement ou organisme d'enseignement public ou privé en exécution de l'obligation scolaire, et jusqu'à la fin de l'enseignement secondaire, sous réserve de l'âge limite prévu à l'article 5.
    Cette allocation est attribuée sous réserve que les ressources de la personne seule ou du ménage n'excèdent pas un plafond variable selon le nombre d'enfants à charge, dans la limite de trois enfants par allocataire. Ce plafond est fixé par décret et revalorisé par arrêté conformément à l'évolution du salaire minimum prévu à l'article L. 141-1 du code du travail applicable dans la collectivité départementale de Mayotte, issu de l'ordonnance du 25 février 1991 susvisée.
    Le montant de cette allocation peut varier selon le cycle scolaire suivi par l'enfant. Les établissements scolaires sont autorisés à transmettre les listes d'enfants inscrits à la caisse gestionnaire.


  • Pour les enfants inscrits dans l'enseignement secondaire, une fraction de l'allocation de rentrée scolaire est versée directement aux établissements scolaires.
    L'établissement utilise ces sommes pour acquérir et attribuer aux enfants concernés des fournitures et équipements personnels nécessaires à leur scolarité. Les fournitures et équipements ne comprennent pas ceux liés à la gratuité de l'enseignement scolaire.


  • L'allocation de logement est accordée, au titre de sa résidence principale et sur sa demande, à toute personne percevant les allocations familiales qui paie un minimum de loyer, compte tenu des ressources de la personne ou du ménage, et du nombre d'enfants à sa charge. Sont assimilées à un loyer les mensualités versées pour accéder à la propriété de l'habitation.
    Le logement doit répondre à des conditions minima de salubrité et de peuplement déterminées par arrêté du représentant de l'Etat.
    Les barèmes de cette allocation sont fixés par voie réglementaire ; le nombre d'enfants pris en compte est limité à trois par allocataire.
    La caisse gestionnaire est habilitée à faire vérifier sur place si le logement satisfait aux exigences prévues au présent article. Le même droit est reconnu aux médecins inspecteurs de la santé et aux inspecteurs des affaires sanitaires et sociales. Le contrôle du montant des loyers et de l'importance des ressources du bénéficiaire est assuré par le personnel assermenté de cette caisse auquel les administrations publiques et les administrations financières sont tenues de communiquer toutes les pièces nécessaires à l'exercice de leurs fonctions.
    Lorsque, par suite d'un défaut d'entretien imputable au bénéficiaire, le logement cesse de remplir les conditions prévues au deuxième alinéa du présent article ou lorsque le bénéficiaire refuse de se soumettre au contrôle prévu, le versement des allocations peut être suspendu ou interrompu.
    Pour les locataires, ainsi qu'en cas d'accession à la propriété avec un emprunt, l'allocation de logement est versée directement au bailleur ou au prêteur. Son montant est déduit, par le bailleur ou prêteur, du montant du loyer et des dépenses accessoires de logement, ou de celui des charges de remboursement de l'emprunt. Cette déduction est portée à la connaissance de l'allocataire. Ces dispositions ne sont pas applicables en cas de refus du bailleur ou du prêteur.


  • Les prestations familiales sont incessibles et insaisissables, sauf pour le recouvrement des prestations indûment versées.


  • Les articles L. 512-5, L. 551-1, L. 552-1, L. 552-3, L. 553-1, L. 554-1, L. 554-2, L. 554-3, L. 554-4, L. 583-1 et L. 583-3 du code de la sécurité sociale sont applicables aux prestations prévues au présent chapitre.


  • Tout paiement indu de prestations familiales peut, sous réserve que l'allocataire n'en conteste pas le caractère indu, être récupéré par retenues sur les prestations à venir, ou par remboursement intégral de la dette en un seul versement si l'allocataire opte pour cette solution.
    Les retenues mentionnées au premier alinéa ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé.
    La créance de l'organisme peut être réduite ou remise en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manoeuvre frauduleuse ou de fausse déclaration.


  • Un décret fixe les modalités d'application du présent chapitre, notamment la composition du dossier de demande de prestations familiales et la nature des documents justifiant de la régularité de l'entrée et du séjour des étrangers.


  • La caisse gestionnaire du régime des prestations familiales à Mayotte exerce une action sociale en faveur des ressortissants du régime et de leurs familles dans le cadre d'un programme défini par arrêté des ministres chargés des affaires sociales et de l'outre-mer, après avis de son conseil d'administration et de la Caisse nationale des allocations familiales.


  • Au titre de son action sociale, la caisse verse une contribution à la prise en charge des frais de restauration scolaire aux organismes ou collectivités locales chargés de la gestion du service de la restauration scolaire à Mayotte, avec lesquels la caisse passe convention.
    Les modalités de cette contribution affectée au fonctionnement du service et versée en fonction du nombre de repas ou collations servis sont définies, en tant que de besoin, par arrêté des ministres chargés des affaires sociales et de l'outre-mer.


  • Chacune des missions d'action sociale prévues aux articles 15 et 16 est financée par une fraction, fixée par arrêté des ministres chargés des affaires sociales et de l'outre-mer, des ressources du régime prévues au I de l'article 18.


  • I. - Sont affectés au financement des prestations familiales, de l'action sociale et de la gestion administrative du régime des prestations familiales de Mayotte :
    1° Le produit des cotisations dues au titre des prestations familiales par tout employeur de salariés ; ces cotisations sont assises, dans la limite d'un plafond fixé par décret, sur l'ensemble des sommes versées en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les traitements, les indemnités, les primes de toute nature, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour contributions et cotisations salariales, les gratifications et tous les autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire ;
    2° Le produit des cotisations assises sur les revenus professionnels des employeurs et travailleurs indépendants pris en compte pour la détermination du revenu imposable dans les conditions prévues au 2° du II de l'article 21 de l'ordonnance du 20 décembre 1996 susvisée et supérieurs à un seuil fixé par décret ;
    3° En tant que de besoin, une contribution d'équilibre de la Caisse nationale des allocations familiales.
    II. - Le taux des cotisations prévues au 1° et 2° du I du présent article est fixé par décret. Ces cotisations sont recouvrées par la caisse de prévoyance sociale de Mayotte créée par l'article 22 de l'ordonnance du 20 décembre 1996 susvisée.


  • I. - A titre temporaire, dans l'attente de la création d'une caisse d'allocations familiales de Mayotte, la gestion du régime des prestations familiales institué par la présente ordonnance est confiée à la caisse d'allocations familiales de la Réunion, à l'exception du recouvrement des cotisations opéré conformément au II de l'article 18.
    Le paiement des prestations visé à l'alinéa précédent par la caisse d'allocations familiales de la Réunion est effectué par prélèvement sur la trésorerie de la branche famille visée à l'article L. 200-2 du code de la sécurité sociale. Le montant de ce prélèvement vient en déduction de la contribution d'équilibre visée au 3° du I de l'article 18 ci-dessus. Le montant mensuel des prestations payées par la caisse d'allocations familiales de la Réunion pour le compte du régime des prestations familiales de Mayotte est notifié à la Caisse nationale des allocations familiales dans des conditions déterminées par décret.
    II. - La caisse d'allocations familiales de la Réunion perçoit à ce titre des frais de gestion, calculés au prorata des dépenses du régime, et dont le taux est fixé par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et de l'outre-mer. Les opérations financières et comptables du régime des prestations familiales de Mayotte font l'objet d'une comptabilité distincte conformément aux dispositions du chapitre III du titre V du livre II du code de la sécurité sociale. Les opérations de trésorerie sont retracées dans des comptes spécifiques ouverts à cet effet.
    La caisse d'allocations familiales de la Réunion contribue en outre à préparer la création d'une caisse d'allocations familiales de Mayotte.
    III. - Une commission d'action sociale, présidée par le représentant de l'Etat à Mayotte et composée des représentants des organisations représentatives des salariés et des employeurs à Mayotte, d'organisations représentant les familles ainsi que de personnes qualifiées, définit les orientations de l'action sociale en faveur des ressortissants du régime des prestations familiales de Mayotte dans le cadre du programme prévu à l'article 15. Elle exerce les missions dévolues au conseil d'administration de la caisse gestionnaire par l'article 15. Un décret précise sa composition et ses modalités de fonctionnement.
    IV. - Les dispositions de l'article L. 114-1-1 du code de la sécurité sociale sont applicables au régime des prestations familiales de Mayotte.
    V. - Le régime des prestations familiales de Mayotte est soumis au contrôle de la Cour des comptes selon les modalités et les sanctions prévues à l'article L. 154-1 du code de la sécurité sociale.


  • L'ordonnance du 20 décembre 1996 susvisée est ainsi modifiée :
    I. - Le 5° du II de l'article 22 est abrogé ;
    II. - Au III de l'article 22, le terme : « 5° » est remplacé par le terme : « 4° » ;
    III. - Le IV de l'article 22 devient le V ;
    IV. - Il est inséré, à l'article 22, un IV ainsi rédigé :
    « IV. - La caisse de prévoyance sociale de Mayotte assure, dans les conditions prévues au III ci-dessus pour les ressources des régimes mentionnés aux 1° à 4° du II, le recouvrement des cotisations du régime des prestations familiales de Mayotte prévues aux 1° et 2° du I de l'article 18 de l'ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l'extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte. »
    V. - Après le II de l'article 25, il est inséré un III ainsi rédigé :
    « III. - Le représentant de l'Etat peut :
    « 1° En cas d'irrégularités graves, de mauvaise gestion ou de carence du conseil d'administration de la caisse de prévoyance sociale, suspendre ou dissoudre ce conseil et nommer un administrateur provisoire ;
    « 2° Si les irrégularités graves ou la mauvaise gestion sont imputables à un ou plusieurs membres du conseil d'administration, révoquer ceux-ci après avis dudit conseil. »
    VI. - A l'avant-dernière phrase du I de l'article 26, les mots : « et du régime mentionné au 5° » sont supprimés.


  • Le régime institué par la présente ordonnance n'est pas applicable aux magistrats et aux fonctionnaires civils et militaires de l'Etat dont le centre des intérêts matériels et familiaux est situé hors de Mayotte.


  • I. - Les dispositions transitoires suivantes s'appliquent durant l'année 2002 :
    a) Les personnes bénéficiant au 31 décembre 2001 des allocations familiales versées par la caisse de prévoyance sociale de Mayotte, par les collectivités territoriales ou par des établissements publics, continuent de percevoir ces allocations dans les mêmes conditions jusqu'au 30 septembre 2002 ;
    b) Les autres personnes bénéficient des prestations familiales à compter du 1er mars 2002 ; elles sont affiliées au régime des prestations familiales de Mayotte ;
    II. - La caisse gestionnaire du régime des prestations familiales de Mayotte rembourse aux organismes mentionnés au a du I ci-dessus les dépenses engagées au titre des allocations familiales versées aux personnes mentionnées au même a, ainsi que les frais de gestion qui s'y rapportent ;
    III. - L'allocation de logement est versée à compter du 1er janvier 2003.


  • La présente ordonnance entre en vigueur le 1er mars 2002.


  • Le Premier ministre, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, la ministre de l'emploi et de la solidarité, le ministre de l'intérieur et le secrétaire d'Etat à l'outre-mer sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution de la présente ordonnance, qui sera publiée au Journal officiel de la République française.


Fait à Paris, le 7 février 2002.


Jacques Chirac


Par le Président de la République :


Le Premier ministre,
Lionel Jospin
Le ministre de l'intérieur,
Daniel Vaillant
Le ministre de l'économie,
des finances et de l'industrie,
Laurent Fabius
La ministre de l'emploi et de la solidarité,
Élisabeth Guigou
Le secrétaire d'Etat à l'outre-mer,
Christian Paul

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