Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2017-651 du 27 avril 2017 relative aux immeubles et objets mobiliers classés ou inscrits au titre des monuments historiques

NOR : MCCB1704153P
ELI : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/rapport/2017/4/28/MCCB1704153P/jo/article_snum1
JORF n°0100 du 28 avril 2017
Texte n° 84

Version initiale


Monsieur le Président de la République,
Le 4° de l'article 95 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine a autorisé, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement à prendre, par voie d'ordonnance les mesures visant à modifier le livre VI du code du patrimoine relatif aux monuments historiques, aux sites patrimoniaux remarquables et à la qualité architecturale et, par cohérence, les dispositions d'autres codes pour :


- rapprocher le régime des immeubles et des objets mobiliers inscrits de celui des immeubles et des objets mobiliers classés en matière d'aliénation, de prescription, de servitudes légales, de procédures, de protection, d'autorisation de travaux et d'expropriation pour cause d'utilité publique ;
- définir des exceptions au caractère suspensif du recours exercé à l'encontre de la décision de mise en demeure d'effectuer des travaux de réparation ou d'entretien d'un monument historique classé.


Une ordonnance a en conséquence été élaborée en tenant compte, pour partie (livre VI du code du patrimoine), du 7° de l'article 95 de la loi du 7 juillet 2016 précitée selon lequel le Gouvernement est autorisé à réorganiser le plan du code du patrimoine, à harmoniser la terminologie et à abroger ou adapter des dispositions devenues obsolètes afin d'en améliorer la lisibilité et d'en assurer la cohérence.
Elle est nommée ordonnance relative aux immeubles et objets mobiliers classés ou inscrits au titre des monuments historiques.


I. - Contenu de l'ordonnance


Les dispositions relatives aux immeubles et objets mobiliers protégés au titre des monuments historiques sous l'empire de la loi du 31 décembre 1913, codifiée en 2004 dans le livre VI du code du patrimoine, sont devenues sur bien des aspects obsolètes ou sont à clarifier.
L'ordonnance s'emploie dès lors à :


- préciser et harmoniser les critères et procédures de classement et d'inscription au titre des monuments historiques des immeubles et objets mobiliers.


Les propositions de modification des articles relatifs à la protection tendent à homogénéiser les critères de la protection entre les deux grandes catégories de monuments historiques (immeubles et objets mobiliers) classés et inscrits et les ensembles historiques mobiliers, et à rendre plus explicite la prise en compte de types de patrimoines dont le législateur de 1913 n'avait pas envisagé la protection (patrimoine industriel, scientifique et technique, patrimoines archéologique et ethnologique).
L'ordonnance prend en compte les critères définis par la loi du 7 juillet 2016 précitée pour le classement des ensembles historiques mobiliers et parmi les critères de la protection, l'appartenance d'un bien à l'emprise d'un domaine national.


- rapprocher le régime des immeubles et objets mobiliers inscrits de celui des immeubles et objets mobiliers classés en matière d'autorisations de travaux, d'aliénation, de prescription, de servitudes légales et d'expropriation pour cause d'utilité publique.


Plusieurs conséquences du classement, prévues dès la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques, n'ont ensuite pas été transposées à l'inscription, instituée pour les immeubles à partir de 1927, puis pour les objets mobiliers à partir de 1971.
Il convient donc de supprimer certaines incohérences historiques entre les deux régimes, pour rendre le droit plus clair, et faire bénéficier aux biens inscrits certaines dispositions de sauvegarde indispensables, attachées depuis l'origine aux biens classés.
En outre, le rapprochement des procédures d'autorisation de travaux pour les immeubles et pour les objets mobiliers protégés au titre des monuments historiques, mesure proposée par le conseil de la simplification pour les entreprises en octobre 2014 et annoncée par le Gouvernement dans le cadre de la modernisation de l'action publique, permet d'unifier et de simplifier les procédures, pour les porteurs de projets comme pour les services instructeurs, par l'institution de l'autorisation unique sur monument historique. Ainsi treize procédures seront remplacées par deux.
Clarifier ainsi les dispositions du code du patrimoine et du code de l'urbanisme, en améliorant la cohérence du dispositif relatif aux biens protégés au titre des monuments historiques, s'effectue sans remettre en cause les différences fondamentales entre le classement et l'inscription.


- substituer au régime actuel de l'instance de classement un régime d'instance de protection pour les immeubles et les objets mobiliers.


Un régime d'instance de protection au titre des monuments historiques remplacera l'instance de classement prévue par l'article actuel L. 621-7. Le but principal de l'instance est de donner aux services le temps d'instruire un dossier, et de recueillir l'avis des commissions consultatives compétentes, pour évaluer l'intérêt d'un bien menacé, et procéder à son classement, à son inscription, voire renoncer à toute protection.
Le nouvel article permet de clarifier la procédure et de préciser la nature de l'instance comme une mesure conservatoire, temporaire, distincte du classement et de l'inscription. L'ordonnance confirme également que la portée de l'instance est limitée à l'immeuble qu'elle vise, et que cette mesure conservatoire, essentiellement provisoire, ne crée pas d'effet pour les immeubles situés aux abords de l'immeuble visé.
Enfin, dans un souci de cohérence, les mêmes modifications (dénomination et positionnement dans le texte) sont proposées pour les objets mobiliers.


- définir des exceptions au caractère suspensif du recours exercé à l'encontre de la décision de mise en demeure d'effectuer des travaux de réparation ou d'entretien d'un monument historique classé.


Les effets de la mise en demeure d'effectuer les travaux indispensables à la conservation d'un immeuble classé (notamment la possibilité de réaliser des travaux d'office, au cas où le propriétaire ne se conformerait pas à cette mise en demeure) sont systématiquement suspendus en cas de recours du propriétaire devant le tribunal administratif. Il en résulte, par le jeu des éventuels recours en appel et en cassation, que des travaux indispensables et urgents peuvent n'être entrepris que plusieurs années après la mise en demeure. L'immeuble, pendant ce temps, a continué de se dégrader, ce qui peut occasionner des pertes irrémédiables pour le patrimoine culturel, et des surcoûts, par rapport à une intervention rapide, pour l'Etat et, en définitive, pour le propriétaire, appelé à participer au financement des travaux. La procédure de mise en demeure n'est, en conséquence, utilisée que très exceptionnellement, au détriment de la conservation de certains immeubles classés.
Il convient donc d'assouplir le régime existant, sous le contrôle du juge, en permettant à l'administration, en invoquant l'urgence des travaux, afin d'éviter une dégradation imminente et irréversible de l'immeuble de lever le caractère suspensif du recours.


- harmoniser les procédures de récolement des objets mobiliers protégés classés ou inscrits au titre des monuments historiques en rapprochant le délai de récolement des objets mobiliers protégés au titre des monuments historiques du délai de récolement des collections des musées de France.


Il importe d'étendre l'obligation de récolement aux objets inscrits, et d'adapter le délai quinquennal originel pour tenir compte du passage, en un siècle, d'un corpus de quelque 20 000 objets mobiliers classés, à un corpus plus de dix fois supérieur d'objets mobiliers protégés.


- réviser en conséquence le plan du livre VI du code du patrimoine.


L'ensemble de ces mesures a donc pour effet de rapprocher de nombreuses dispositions entre biens classés et inscrits, révisant dès lors le plan du livre VI du code du patrimoine et notamment les sections 1 à 3 du chapitre Ier du titre II et du chapitre II du titre II.
Ainsi, alors que chaque chapitre (immeubles et objets mobiliers) est actuellement organisé de la manière suivante : Section 1 - Classement, Section 2 - Inscription, Section 3 - Dispositions communes aux classés et aux inscrits, l'ordonnance organise chaque chapitre comme suit : Section 1 - Classement et inscription, Section 2 - Conservation et restauration, Section 3 - Régime de propriété.
Ce nouveau plan évite des doublons et répétitions, et devrait s'avérer plus lisible et plus synthétique. Il réduit d'un tiers le nombre d'articles du livre VI du code du patrimoine afférents à la protection des monuments historiques.


II. - Structure de l'ordonnance


L'ordonnance comprend vingt-quatre articles dont trois viennent principalement modifier le livre VI du code du patrimoine :
Les articles 4 et 6 procèdent au rapprochement des régimes des immeubles et objets mobiliers inscrits de celui des immeubles et objets mobiliers classés. Ils modifient chacun en ce qui le concerne les sections 1 à 3 du chapitre Ier et du chapitre II du titre II relatif aux monuments historiques.
L'article 5 supprime l'actuelle section 5, renomme l'actuelle section 6, relative aux domaines nationaux, en section 5, et procède à quelques modifications de cohérence dans son plan et la numérotation de ses articles.
Les articles 2, 3 et 7 à 20 modifient en cohérence les dispositions des codes du patrimoine, de l'urbanisme, de l'environnement, de l'expropriation pour cause d'utilité publique et de la voirie routière et des codes généraux des collectivités territoriales et de la propriété des personnes publiques.
Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation.
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.

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