Dossiers législatifs

LOI organique n° 2011-918 du 1er août 2011 relative au fonctionnement des institutions de la Polynésie française

Exposé des motifs

Le présent projet de loi a pour objet d'améliorer le fonctionnement des institutions de la Polynésie française : il comporte pour l'essentiel des dispositions visant à permettre la constitution d'une majorité stable à l'assemblée et d'autres mesures qui tendent à rationaliser les relations entre l'exécutif local et l'assemblée de la Polynésie française.


Titre Ier : Dispositions relatives à l'élection des représentants à l'assemblée de la Polynésie française

Les articles 1er à 4 ont pour objet de garantir une meilleure représentation des différents archipels, notamment par la création d'une nouvelle circonscription électorale, et d'attribuer dans chaque circonscription une prime majoritaire à la liste qui obtient soit la majorité absolue des suffrages au premier tour de scrutin, soit la majorité relative au second tour.
L'effectif des membres de l'assemblée est maintenu à 57 représentants, répartis entre les différentes circonscriptions constituées par les archipels : 45 pour la nouvelle circonscription des îles de la Société qui regroupe les deux circonscriptions actuelles des îles du Vent et des îles Sous le Vent et est composée de quatre sections électorales ; 3 pour les îles Australes, 3 pour les îles Marquises, 3 pour les îles Tuamotu de l'Est et Gambier, 3 pour les îles Tuamotu de l'Ouest, comme actuellement.
L'équilibre dans la représentation des différents archipels est garanti au regard du principe de représentation démographique. Les îles de la Société (îles du Vent, dont notamment Tahiti, et îles-Sous-le-Vent), qui concentrent 87 % de la population, éliront 79 % des membres de l'assemblée, et les archipels éloignés, qui comptent 13 % de la population polynésienne, en éliront 21 %.
Cette répartition est conforme à la décision du Conseil Constitutionnel n° 2004-490 du 12 février 2004 sur la loi organique statutaire du 27 février 2004, qui rappelle « l'intérêt général qui s'attache à la représentation des archipels éloignés », et équilibrée au regard de l'exigence démocratique de représentativité de chaque membre de l'assemblée compte tenu du nombre d'habitants dans chaque circonscription.
Dans l'ensemble des circonscriptions, les représentants sont élus au scrutin de liste, à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne à un ou deux tours, assortie d'une prime majoritaire.
A cet effet, les articles 1er à 4 procèdent à la modification des articles 104, 105, 106 et 107 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française.

L'article 1er précise les circonscriptions électorales ainsi que, pour la circonscription des îles de la Société, les sections électorales, et la répartition des sièges entre elles.
L'article 2 décrit le mode de scrutin applicable dans les différentes circonscriptions.
L'article 3 précise le nombre de candidats devant figurer sur chaque liste.
L'article 4 définit les modalités électorales en cas de vacance de siège.

Titre II : Dispositions relatives à l'organisation et au fonctionnement des institutions de la Polynésie française

L'article 5 réduit, par une modification de l'article 73 de la loi organique précitée, le nombre des membres du gouvernement polynésien de 15 à 7. Cette proposition repose sur deux motifs principaux : répondre à une demande fortement exprimée par la société civile en Polynésie française et tenir compte de la nécessité de réaliser des économies budgétaires. L'effectif proposé de sept ministres, auxquels s'ajoutent le président et le vice-président, est raisonnable au regard de la taille de la collectivité. Le statut ainsi modifié doit permettre de constituer des ministères plus homogènes et cohérents, aux attributions plus larges et complémentaires afin d'éviter les doubles emplois.
Pour les mêmes raisons, la modification de l'article 86 de la loi organique, effectuée à l'article 7 du projet de loi, vise à mettre fin au recrutement pléthorique des collaborateurs par le gouvernement de la Polynésie française, en le limitant à quinze par ministre. Le gouvernement, dans les années 2000, a pu avoir pas moins de 693 collaborateurs sous sa responsabilité.
L'article 6 complète l'article 74 de la loi organique, en limitant à deux mandats successifs (dix ans) l'exercice du pouvoir par le président de la Polynésie française. L'objectif poursuivi est de favoriser le renouvellement de la classe politique polynésienne.
Une mesure analogue a été instituée pour le Président de la République lors de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.
L'article 8, qui modifie l'article 121 de la loi organique, propose de supprimer la possibilité de renverser chaque année le président de l'assemblée de la Polynésie française.
La rédaction actuelle de l'article 121 permet en effet à l'assemblée de la Polynésie française d'interrompre chaque année le mandat de son président si la majorité absolue de ses membres le souhaite. Ce dispositif, unique dans les collectivités locales françaises, contribue fortement à l'instabilité politique locale. Or, la présidence de l'assemblée est pourtant une fonction pivot des institutions de la Polynésie française.
L'article 8 réduit en conséquence la possibilité de changement du président au gré des fluctuations politiques par une limitation des hypothèses de renouvellement intégral du bureau.
Le renouvellement anticipé ou annuel du bureau deviendrait impossible, sauf en cas de démission du président de l'assemblée de la Polynésie française : ainsi, le bureau et le président seraient élus pour la totalité du mandat de l'assemblée. La démission du président entraînerait celle du bureau, mais non l'inverse.
L'article 9 modifie les articles 147 et 149 de la loi organique relatifs au conseil économique, social et culturel. Il prévoit que la composition du conseil assure une représentation de l'ensemble des archipels et fixe à 43 le nombre maximum de ses membres, qui fait l'objet d'une délibération de l'assemblée de la Polynésie française.
Cette mesure a pour objet de garantir la représentation des archipels, notamment les archipels éloignés de Tahiti, au sein des institutions de la collectivité. Dénonçant un centralisme excessif des institutions polynésiennes, les élus des archipels ont en effet tendance à faire valoir systématiquement les intérêts de leurs îles lors des votes à l'assemblée, faute de disposer d'une autre voie organisée d'expression institutionnelle.
Par ailleurs, dans un souci de rationalisation des dépenses publiques et d'efficacité du travail du conseil économique, social et culturel, l'article 9 propose de plafonner le nombre des membres du conseil à un effectif de 43 répartis en trois collèges.
L'article 10 modifie l'article 156 de la loi organique, en augmentant le nombre d'élus nécessaire pour le dépôt et l'adoption de la motion de défiance dite « constructive ».
Au niveau national, la responsabilité du Gouvernement devant le Parlement est organisée par la Constitution de la Vème République, qui encadre strictement ses modalités de mise en jeu, notamment pour éviter l'instabilité politique ; le fait majoritaire aidant, son utilisation est rendue difficile.
La loi organique statutaire de la Polynésie française a mis en place un dispositif qui en est fortement inspiré. Mais force est de constater que la motion de défiance y reste un vecteur d'instabilité politique et s'avère donc peu « constructive ». Dix gouvernements ont été renversés depuis 2004.
Tout en conservant le principe de la responsabilité du gouvernement de la Polynésie française devant l'assemblée, l'article 10 prévoit de renforcer les conditions de dépôt et d'adoption de chaque motion de défiance : un tiers, au lieu du quart, des membres de l'assemblée sera nécessaire pour rendre recevable une motion de défiance ; de plus, celle-ci ne sera adoptée que si elle est votée par une majorité qualifiée des trois cinquièmes des membres de l'assemblée, et non plus par la majorité absolue.
L'article 11 modifie l'article 156-1 de la loi organique en calquant les règles de dépôt et d'adoption pour la motion de renvoi budgétaire sur celles prévues à l'article 10 pour la motion de défiance. Il s'agit d'une disposition de cohérence, car le durcissement des règles relatives à la motion de défiance ne doit pas se traduire par un recours accru à la motion de renvoi budgétaire pour exprimer le mécontentement d'une partie de l'assemblée.
En Nouvelle-Calédonie, l'article 184 de la loi statutaire prévoit déjà de telles règles de majorité de dépôt et d'adoption de la motion de renvoi budgétaire.
L'article 12 modifie l'article 157-2 de la loi organique. Il propose d'instaurer un seuil minimum pour les aides financières qui doivent être examinées par la commission de contrôle budgétaire et financier de l'assemblée polynésienne, à la demande du président de la Polynésie française, avant leur adoption éventuelle par l'assemblée de la Polynésie française.

Il s'agit d'une mesure de bon sens, car l'absence de seuil conduit notamment à retarder l'attribution des subventions d'un faible montant à des associations, par exemple dans le cadre de la politique de la ville, retard qui peut mettre en cause la réalisation même de l'objet de la subvention.
La modification proposée prévoit qu'un rapport annuel est fourni à l'assemblée de la Polynésie française sur le montant, l'objet et l'utilisation des aides financières situées en deçà d'un seuil fixé par décret.

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